L’État a choisi d’imposer le changement au secteur du logement social. Pas un changement cosmétique, mais un changement systémique. Celui qui impose de repenser sa vision, sa chaîne de valeur et ses facteurs clés de succès. Les bailleurs sont donc appelés à effectuer un pivot, c’est-à-dire à opérer un regard neuf sur leur métier, leur stratégie et leurs pratiques. Ce billet est un voyage dans le monde du bailleur social du futur vu comme un fournisseur de services.
Quels services ?
L’État apporte quelques indices sur sa vision du métier du bailleur de demain.
Le bailleur social est invité à placer le client au centre de son dispositif (ALUR). Il assure un service efficace : un accès fluide et rapide au logement social (ELAN). Il sait favoriser la mixité sociale et gérer les équilibres de peuplement sur ses territoires. Ses règles d’attribution doivent devenir transparentes (ELAN).
Proposer des solutions résidentielles viables
Le cœur de métier du bailleur social est de fournir des solutions résidentielles viables pour l’ensemble des parties prenantes. Au premier cercle, le bailleur et le demandeur. Au second cercle, les membres de la CAL et les réservataires.
Le bailleur doit également s’assurer que la solution jugée viable par les parties prenantes lors de l’attribution reste viable durant toute la durée du bail. Dès lors, l’indice de viabilité (sujet que nous aborderons lors d’un prochain billet) constitue un marqueur à objectiver et un indicateur de prise de décision.
Fournir des services aux locataires
Le bailleur social peut également compléter sa mission première par des services destinés à ses locataires. Certains organismes conscients de la fragilité économique des populations prennent l’initiative de proposer des solutions permettant d’améliorer le pouvoir d’achat de leurs locataires (achat groupé, système d’entraide, monnaie locale, etc..). Ces initiatives ont le mérite de renforcer le lien social entre les locataires, contribuer à prévenir les impayés, et un mieux vivre ensemble.
Quels services pour demain ?
Si le bailleur social place le client au centre de sa stratégie commerciale, quels autres services pourrait-il alors offrir ?
- Prédire le délai d’attribution et informer chaque demandeur en fonction de sa file d’attente. Ce qui revient à savoir estimer la probabilité du délai d’attribution en tenant compte des objectifs posés sur les territoires et de la rotation prévisible
- Piloter sa politique de peuplement afin de rééquilibrer l’occupation et renforcer l’attractivité résidentielle de son patrimoine
- Anticiper l’offre future en ayant capacité à programmer une offre qui rencontre sa clientèle par l’effet de la transformation de la demande stagnante observée en programmes de construction. Ce qui revient à bâtir une offre pour les habituels laissés pour compte (les « poulidors » de l’attribution).
Adopter l’agilité dans l’organisation
Devenir fournisseur de services passe nécessairement par une certaine forme d’agilité. Le bailleur de demain saura-t-il injecter la dose d’agilité nécessaire à son organisation ?
Cela suppose l’acquisition de nouvelles capacités, par exemple :
- Piloter le processus de mise en location (Désignation/instruction/attribution)
- Disposer en temps réel des solutions résidentielles viables du point de vue du bailleur et du point de vue du ménage dès lors qu’un logement est disponible, sans avoir à effectuer des opérations de requêtes fastidieuses qui souvent masquent des candidats compatibles
- Instrumenter le processus de prospection par des objectifs de peuplement. Ce qui simplifie et rend plus efficace le travail des chargés de clientèle
- Éliminer les délais d’attente inutiles qui jalonnent le parcours de mise en location (délai de désignation réservataire, de visites, de travaux, d’attribution, etc)
En résumé, piloter le processus métier qui est au cœur de la chaîne de valeur tel un régulateur de température, c’est-à-dire savoir compenser les événements extérieurs par des actions internes.
Devenir « le partenaire » des EPCI
L’EPCI devient un acteur primordial dans l’écosystème du bailleur social. La pleine maîtrise des objectifs de peuplement dans le processus d’attribution fera du bailleur un partenaire privilégié de l’EPCI. Par ailleurs sa capacité à remonter les données issues des réalités terrain leur permettront d’ajuster ou de réviser les objectifs de peuplement.
Peut-être avez-vous déjà expérimenté certains de ces services (ou d’autres) ?
Vos expériences confirment-elles ou infirment-elles ce point de vue ?